La dépendance accrue aux hyperscalers constitue une problématique centrale, renforcée par les restrictions américaines sur les exportations de GPU vers la Chine, la complexité de l’accès aux modèles d’IA et les effets extraterritoriaux du Cloud Act.
Souveraineté et MLOps, une combinaison vertueuse
Alexis Gendronneau, Directeur Data & IA, NumSpot partage son expertise sur le sujet.
En effet, le problème cesse d’être seulement technique et devient géopolitique lorsque les chaînes MLOps reposent sur des infrastructures soumises à des décisions politiques extérieures. La compétition autour du cloud se joue alors sur une dimension plus large que la simple performance : elle se joue au niveau de la souveraineté. Développer des MLOps sur des environnements souverains constitue désormais un impératif stratégique.
Des dépendances devenues vulnérabilités
Confier ses données et ses chaînes d’IA à un opérateur dans une juridiction étrangère revient à accepter plusieurs risques. Un changement réglementaire peut bloquer instantanément l’accès à des ressources essentielles — GPU, API, frameworks. Un fournisseur peut interrompre le support sur site, comme l’a illustré Atlassian en imposant à ses clients une migration forcée vers le cloud. Les promesses de réversibilité s’évanouissent face à des services propriétaires fermés, et les données peuvent être exposées à des usages tiers non maîtrisés.
Dans les pipelines MLOps, cette dépendance se traduit par une fragilité systémique : déploiements et supervision soumis à des services extérieurs, conformité incertaine sur des clouds étrangers au RGPD, capacité de mise à l’échelle dépendante d’acteurs influencés par des tensions géopolitiques. En somme, construire des systèmes d’IA sur des infrastructures non souveraines revient à ériger des fondations sur un terrain instable.

Alexis Gendronneau, Directeur Data & IA, NumSpot
L’émergence d’un modèle souverain et ouvert
Une alternative crédible se dessine pourtant. Longtemps présentée par les éditeurs propriétaires comme plus complexe à mettre en œuvre, cette voie s’impose désormais comme la plus rationnelle à l’ère des grands modèles de langage et des agents autonomes. Dans le domaine de l’intelligence artificielle, l’open source occupe déjà une place dominante : la majorité des outils utilisés en production en sont issus.
La construction d’une suite MLOps souveraine repose sur deux axes complémentaires. Le premier s’appuie sur des briques open source telles que Kubeflow, MLflow, Feast, Kubernetes ou PostgreSQL. Chacune assure une fonction essentielle — orchestration, gestion des workflows, supervision des modèles ou infrastructure. Ensemble, elles composent un écosystème modulaire, évolutif, interopérable et durable, facilement déployable par la plupart des opérateurs.
Le second axe réside dans le recours à des opérateurs souverains. Hébergés en Europe, conformes au RGPD et aux standards SecNumCloud, ces acteurs garantissent transparence, réversibilité et sécurité. Ils offrent un espace de confiance où les services peuvent s’appuyer sur une infrastructure maîtrisée. Les flux peuvent ainsi circuler entre clouds publics et environnements privés, favorisant l’hybridation et assurant une continuité d’activité en cas d’incident. Ce modèle renforce la résilience face aux pénuries de GPU et facilite l’accès à des ressources de calcul de dernière génération sans investissements lourds.
De cette combinaison naît une plateforme MLOps à la fois transparente — grâce à un code auditable et à des dépendances identifiées – , maintenable — par l’absence de services propriétaires opaques —, prévisible — grâce à des contrats clairs — et pleinement souveraine, maîtrisant l’ensemble du cycle de vie des données et des modèles.
La souveraineté numérique ne relève pas d’une posture défensive, mais d’une stratégie durable. Concevoir des chaînes MLOps souveraines revient à protéger les innovations en intelligence artificielle contre les aléas politiques extérieurs. Cela signifie aussi doter les écosystèmes européens de leviers leur permettant de rivaliser, non par la taille, mais par la maîtrise et la robustesse.
Préserver l’indépendance des modèles d’IA, c’est s’assurer que leurs fondations ne reposent ni sur Washington, ni sur Pékin, ni sur des décisions prises ailleurs qu’en Europe. Au-delà de la technologie, c’est la capacité collective à innover librement, à long terme, qui se joue dans cette approche souveraine et responsable du MLOps.
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